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2040... avec Cynthia Fleury

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Prendre soin de nos vulnérabilités, avec Cynthia Fleury, philosophe psychanalyste.

Dans le podcast "Dites à l'Avenir que nous arrivons", réalisé avec les Eclaireurs - le média des initiatives positives de Canal+ Group - et l'Institut des Futurs souhaitables, Mathieu Baudin, Directeur de l'Institut reçoit un.e invité.e qui lui partage son regard sur l’époque, confie ses visions de futurs souhaitables et ses contributions concrètes pour les faire advenir. Ces échanges se finissent sur un conte situé en 2040, que nous co-écrivons, Matieu et moi, sur la base des propos et projets de l'invité.

#CParti!... Cap sur 2040!

Prendre soin de nos vulnérabilités, avec Cynthia Fleury

Paris. 2040.

Nous nous trouvons dans cette ville dont tu as toujours voulu t’éloigner

mais qui te va si bien.

Plus précisément dans ce lieu, entre lumière et silence,

face à Notre-Dame, éternelle et si nouvelle.

Ceci plus encore depuis, qu’après les élections de 2022, l’écologie est devenue le sujet postpartisan par excellence. La nouvelle dynamique politique a ainsi décidé de ne plus couper les arbres centenaires afin de remplacer la forêt de poutres consumées, mais de planter puis de laisser émerger une canopée nouvelle, au-dessus des toits de la Vénérable. Inscrivant ainsi le chef-d’œuvre des bâtisseurs de cathédrales dans son temps.

Celui de la régénération.

Et de l’alliance des vivants.

Cela conforta l’intuition que nous avions depuis longtemps : si la puissance du XXe siècle se mesurait à la capacité de transformer une terre bleue et verte en une terre rouge de cendres à travers le feu nucléaire, la puissance du XXIe siècle résiderait dans son exact contraire, transformant ainsi cette terre rouge et exsangue de nos irréversibilités en une planète bleue et verte, pleine de fertilités…

Nous avons ainsi commencé à prendre au sérieux cette double injonction que nous intimaient tous les scientifiques,
de toutes les disciplines,
depuis tellement de temps : 
« il va falloir faire mieux avec moins »

Et tandis que pendant la première partie de ce siècle, nous avions tendance à nous focaliser sur le moins, sur ce que l’on perdait, ressassant et dénigrant sans espoir ni horizons, les années 20 nous ont fait entrer dans l’air du mieux, et de ce que l’on gagnait ; exaltant et encourageant les actions communes et l’énergie retrouvée.

Émergeant de ce ressentiment généralisé,

nous avons commencé à prendre soin

de nous,

des autres

et de la planète.

Les psys comme toi nous le disaient bien : la seule manière de sortir de la dépression était de faire quelque chose pour reprendre la main sur notre destinée.

Et nous l’avons fait ensemble…

Il faut avouer que ton idée du temps citoyen en entreprise y a grandement contribué.

Ce moment où, par la loi, nous avons décidé que 20% du temps des salariés en entreprise serait payé et dévolu à l’intérêt général donna l’occasion à chacune et chacun qui le souhaitaient, d’exercer son talent au service du bien commun.

L’effet vertueux du faire s’est alors fait sentir.

Et nombreux sont celles et ceux qui se sont mis à faire plus que leur part et à prendre moins que leur dû.

-Les psys comme toi nous le disaient bien : la seule manière de sortir de la dépression était de faire quelque chose pour reprendre la main sur notre destinée.

Tu te rappelles ? … Nous avons commencé à devenir celles et ceux que nous attendions.

Et c’est là que nous avons vu les choses basculer.

 

Le soin est devenu un prisme autant qu’une attention.

Une question politique tout autant qu’un nouvel humanisme…

Progressivement, nous nous sommes mis à valoriser les systèmes solidaires.

L’ensemble des indicateurs a bien sûr beaucoup évolué.

C’est ainsi que l’espérance de vie a été remplacée par l’espérance de vie en bonne santé.

Que l’efficacité des entreprises s’évalue désormais au soin qu’elles se portent les unes vis-à-vis des autres

Et que la mesure d’une inclusion des différences, toujours plus nécessaire, s’est traduite par l’internationalisation d'une partie du Parlement.

D’intégrer ainsi des personnes du monde entier a permis d’internaliser la mondialisation.

Invitant ainsi le monde à notre table, à nos débats, nous avons commencé à mieux l’entendre pour l’intégrer.

À lui donner plus de place dans chacune de nos décisions.

Dans chacun de nos arbitrages.

Mais il est un autre sujet qui est aussi réjouissant.

Toi qui, autrefois, redoutais que « si tous les dégoûtés partent, il ne reste que les dégoûtants », tu dois être heureuse de voir toutes ces nouvelles générations prendre leur responsabilité en rentrant à l’assemblée !

Des générations devenues polyglottes depuis que l'apprentissage du trilinguisme a été généralisé dès le plus jeune âge,

invitées ainsi à naviguer entre différentes grammaires.

À s’enrichir de ces intraduisibles.

À entrecroiser des pensées suivant différentes représentations du monde.

Cela a demandé un effort qualitatif de la part de tous. Mais éthiquement et cognitivement, nous y avons largement gagné. En liberté intérieure tout autant qu’en liberté collective et sociétale…

-C’est ainsi que l’espérance de vie a été remplacée par l’espérance de vie en bonne santé. Que l’efficacité des entreprises s’évalue désormais au soin qu’elles se portent les unes vis-à-vis des autres…

Là où tu redoutais, comme d’autres, que nous ayons finalement besoin de terribles catastrophes pour leviers d’actions, nous sommes partis d’une cartographie d’un nouveau genre, répertoriant les hot spots, les points sensibles de la vulnérabilité dans le monde, pour mettre en marche de nouveaux outils, de nouvelles combinaisons entre souveraineté nationale et gouvernance mondiale. Entre contrat social et contrat avec la planète et l’ensemble des Irremplaçables.

La philosophie n’a finalement jamais été aussi proche de la psychanalyse !... Ce que les Grecs avaient, une fois de plus, bien senti en inscrivant à Delphes deux adages.

L’un connu, inscrit au frontispice, nous invitant à « nous connaître nous-mêmes ».

L’autre un peu moins, « rien de trop », nous invitant à garder la juste mesure en toute chose.

 

Mathieu Baudin et Carole Babin-Chevaye

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Pour retrouver cet épisode du podcast "Dites à l'avenir que nous arrivons" :

Prendre soin de nos vulnérabilités, avec Cynthia Fleury, philosophe psychanalyste
Prendre soin de nos vulnérabilités, avec Cynthia Fleury, philosophe psychanalyste
Prendre soin de nos vulnérabilités, avec Cynthia Fleury, philosophe psychanalyste
Prendre soin de nos vulnérabilités, avec Cynthia Fleury, philosophe psychanalyste

Et le livre "Dites à l'avenir que nous arrivons", LEDUC, juin 2020 :

Le livre "Dites à l'avenir que nous arrivons", LEDUC, juin 2020.